Problématique du prix du lait

Alors que le prix du lait en magasin n’a cessé d’augmenter ces dernières années, les agriculteurs voient leur prix de vente fondre comme neige au soleil. Ils étaient plusieurs centaines à manifester le mercredi 29 avril dernier, notamment au poste frontière d’Hensies où j’ai pu les rencontrer.   Ils s’insurgent face à la diminution catastrophique de leur chiffre d’affaire et contre l’imposition de quotas laitiers par la Commission européenne.  

Les chiffres sont consternants : un agriculteur recevra en moyenne 0,19 euro par litre vendu, tandis que le consommateur final paiera lui plus d’un euro en magasin ! Entre les deux, ce sont donc certains intermédiaires de production qui ramassent les profits. 

Cette situation ne peut plus perdurer. C’est pourquoi j’ai interrogé à la Chambre la Ministre de l’Agriculture pour savoir ce qu’elle comptait faire pour enfin aider les producteurs de lait à retrouver une certaine santé financière. 

Voici le compte-rendu complet de nos échanges :

Question de M. Eric Thiébaut à la ministre des PME, des Indépendants, de l’Agriculture et de la Politique scientifique sur « le prix du lait »

Eric Thiébaut (PS): Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, si vous demandez à une ménagère l’évolution du prix du lait ces derniers temps, elle vous répondra certainement que le litre de lait a augmenté dans le magasin où elle fait ses achats.

Paradoxalement, si vous posez la même question à un agriculteur producteur de lait, il vous répondra l’inverse.

Voilà pourquoi, hier encore, des agriculteurs sont descendus dans la rue, en particulier dans ma commune puisqu’ils ont manifesté au postefrontière d’Hensies. J’ai eu l’occasion d’en rencontrer un grand nombre, de discuter avec eux et de prendre connaissance de leurs revendications. Il semblerait que le secteur connaisse une réelle crise. Les producteurs sont très inquiets pour l’avenir. Ils sont même alarmistes.

On pointe du doigt principalement les quotas laitiers. Cependant, au niveau fédéral, madame la ministre, envisagez-vous une action concrète pour répondre à leurs revendications?

Je sais qu’en 2008 déjà, ils étaient descendus dans la rue. Le gouvernement Leterme avait alors entendu leurs demandes: trois groupes de travail avaient été constitués, présidés chacun par un ministre fédéral. Pourriez-vous me faire un rapport du travail réalisé par ces groupes?

Enfin, sachant qu’aujourd’hui le producteur de lait vend son litre à 19 cents et que la ménagère l’achète à plus d’un euro dans le magasin, n’existe-t-il pas un problème dans la chaîne de production, entre le producteur et le consommateur? Ne faudrait-il par revoir les marges bénéficiaires de certains maillons de la chaîne?

Sabine Laruelle, ministre: Monsieur le président, chers collègues, cette question demande de longs développements et, malheureusement, la majorité des compétences se trouve chez les Régions. Vous savez qu’il y a eu une régionalisation de l’agriculture en 2001 et que l’aspect économique de la filière est régionalisé. Par ailleurs, cette question demande également des réponses au niveau européen. La Commission européenne a déjà pris certaines mesures pour le stockage du beurre, de la poudre de lait et pour le stockage privé. La Belgique participe activement: nous sommes à la septième place de l’Union pour le stock intervention beurre, à la troisième place pour le stockage de la poudre de lait et à la quatrième pour le stockage privé de beurre. Au niveau fédéral, le BIRB a déjà mobilisé une vingtaine de millions d’euros.  Ces mesures ne sont évidemment pas suffisantes. Selon moi, il faudrait une réduction des quotas laitiers au niveau européen.

Malheureusement, en Belgique aujourd’hui, les ministres régionaux ne se sont pas accordés sur une position commune et le pays ne peut donc l’exprimer avec force au niveau européen.

Le groupe de travail que vous mentionnez s’est réuni en juin dernier; des mesures très concrètes ont été prises. L’Observatoire des prix a été instauré. On a déjà réalisé deux études dont une sur le lait qui n’a pas pu conclure avec certitude à l’existence de pratiques illégales. Il ne semble pas y avoir d’entente entre les acteurs les plus importants ni d’abus de position dominante. Le dossier se trouve chez les organisations agricoles qui discutent fermement avec la CBL et avec la grande distribution.

J’ai souhaité pour ma part réunir la commission de l’agriculture contractuelle mais les laiteries et les producteurs flamands ne souhaitaient pas que le fédéral intervienne.

Pour ce qui est de mes compétences, à la suite des réunions de juin 2008, des décisions ont été prises, des tests ESB ont été réduits, ce qui permettra une économie de 2,5 millions d’euros. Il n’y aura plus de test automatique pour la maladie d’Aujeszky des porcs – cela nous éloigne du lait mais l’ordre du jour de ces réunions était plus étendu –, ce qui représente une économie de 7,5 millions d’euros. En outre, il y aura une forte diminution du nombre de tests de bruxellose et leuco. Je vous rappelle également que, pour ce qui concerne mes compétences en sécurité alimentaire, nous avons obtenu une réduction de 75% des cotisations AFSCA pour les producteurs qui paieront désormais 100 euros par an.

Eric Thiébaut (PS): Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse détaillée. Il est important pour nous que tous les groupes politiques pèsent de tout leur poids en faveur de la révision de ces quotas européens. Cela se décide peut-être au niveau de l’Europe mais si nous n’exerçons pas de pression, cela ne bougera certainement pas.

Vous avez évoqué l’Observatoire des prix et les premières études menées. J’en ai pris connaissance, évidemment. Je voudrais réitérer le souhait de mon groupe de voir intégrer dans cet Observatoire des prix des représentants des agriculteurs.

Sabine Laruelle, ministre: L’Observatoire est composé de l’administration et d’experts qui réalisent des études. Ensuite, il y a des discussions au sein de la filière pour lesquelles le gouvernement fédéral et moi-même nous tenons à disposition.

Eric Thiébaut (PS): Nous avons revendiqué la présence d’agriculteurs dans cet Observatoire. Nous pensons qu’elle serait pertinente.

 

1 réponse
  1. Jean
    Jean dit :

    Complexité du système belge à la lecture de la phrase de la Ministre :
    « Monsieur le président, chers collègues, cette question demande de longs développements et, malheureusement, la majorité des compétences se trouve chez les Régions. Vous savez qu’il y a eu une régionalisation de l’agriculture en 2001 et que l’aspect économique de la filière est régionalisé. Par ailleurs, cette question demande également des réponses au niveau européen. »
    Ce triangle régions , fédéral , Europe avec deux régions qui , pour certains sujets peuvent avoir des approche diamétralement opposées . Je suppose que dans ce cas particulier du lait , nos deux régions sont en accord dans l’action ?

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